A B B A N.

♦ Tu t’en souviens ? Ce souvenir de liberté où tu te sentais enfin heureux. Tu avais trouvé ta famille, cette famille parfaite. Les membres la composant ne te plaisaient peut-être pas. Tu les trouvais différents. Les équidés les nomment d’une façon étrange. Pour ma part, ils ne doivent pas être qualifiés, ainsi. Lorsqu’on a fait une rencontre avec l’un d’eux, tu te rends compte que tu t’es trompé. Ce que tu pensais d’eux n’était que des sottises, des bêtises. Mon amour pour eux a été important. Plus que tu ne l’imagines. Tu penseras peut-être négatif en sachant cela de ma personne, je comprendrais. Rares sont ceux qui ne jugent pas. Rares … ♦ J’ai fais énormément de choses en leur compagnie. Énormément. Tu ne me crois pas ? Cela est pourtant la vérité. Tu t’y attaches, au fur et à mesure. Ce souvenir là restera dans ma tête, à jamais. Cela t’étonnera sûrement, je ne souhaite t’en dire plus. Prouve ta curiosité. S’est-elle éveillée en toi ? ♦ Ils sont venus me chercher peu de temps après que je sois devenu adulte. L’un de ces membres est tombé sous mon charme, sous ma beauté. Le suis-je, vraiment ? J’ai tout de suite su que c’était un être bien. Protégé, je l’appelais. Du moins, je le surnommais ainsi. J’ai quitté ma première famille pour rejoindre cette nouvelle, sachant que je les reverrais jamais. ♦ Je me souviens de ces bruits, de ces cris. Ils appelaient Protégé à haute voix, l’acclamant presque. De mon côté, j’ai senti cette liberté. Cette liberté dans mon corps, dans mes muscles. La rapidité. J’étais le plus doué dans ce domaine là. Je me souviens de ces pleurs mélangés à des rires joyeux. Je ne sais toujours pas pour quelle raison est du ce comportement. Je ne sais même pas ce que je faisais, exactement. Que faisais-je pour les rendre si heureux ? ♦ J’étais gâté, durant un très long moment. Il n’y avait que cette famille qui comptait à mes yeux. Et mon ancienne ? Elle avait disparu. Disparu de mon esprit. ♦ Les bruits, les cris, les pleurs et les rires se multipliaient. J’avais l’impression d’être aimé. J’avais trouvé ma place. ♦ Un souvenir particulier revient à plusieurs reprises dans ma tête. Je ne pourrais le décrire avec excellence. Tu saurais le faire, toi ? Je me le demande. J’étais allé avec une rapidité folle, pourtant. Puis soudain, il me semble avoir vu quelque chose d’étrange. Je me suis soudainement arrêté, ayant le regard de plus en plus vide. Que m’arrivait-il ? D’autres équidés sont passés devant moi. Pourquoi, au juste ? Et cela, tu le sais ? Tu pourrais m’expliquer ce qu’il s’était passé ? Je me souviens de ces coups au niveau de mes flancs. Des coups tellement forts qu’ils faisaient atrocement mal. Cet hennissement que je n’avais jamais sorti. Je n’avais jamais ressenti une pareille douleur. Je ne comprenais pas. Surtout cette réaction de leur part. Où était le problème ? Dis-le moi. Cette fois-ci, il n’y avait que des pleurs. Que des pleurs … ♦ D’autres coups quelques temps après. Je ne sentais pas ce poids habituel sur mon dos, il se trouvait devant moi. L’expression sur son visage restera aussi dans ma mémoire. Toujours. ♦ J’ai eu peur. La première fois où j’ai eu peur. Peur de cette famille. Ils allaient encore me donner des coups, je le savais. J’allais encore souffrir, encore hennir de cette façon. Qu’aurais-je du faire ? Tu ne le sais pas, c’est cela. Tu ne sais rien. Tu ne peux comprendre ce que je ressens. Je ne suis qu’un pauvre étalon, ayant déçu ceux qu’il aimait. ♦ Partir. Ai-je bien agis ? C’est pourtant ce que j’ai fais. J’avais toujours ces douleurs sur mes flancs, sur mon encolure, ma croupe. Je les sentais. Horriblement. Loin. Très loin. Lors de ces grandes foulées sur diverses matières, j’ai longuement pensé à ma famille. A ma vraie famille. Elle m’avait peut-être oublié. Qu’en penses-tu ? Ces voyages. Ils resteront aussi gravés dans ma mémoire. Ces voyages dans le sable, dans l’eau, sur la pierre. Mes sabots sont devenus robustes. Je pouvais avancer de plus en plus. Continuer ma route à chaque instant, sans m’arrêter. ♦ Je ne regrette rien. Rien de mon passé. Protégé et les autres y sont, certes. Mais, j’ai été fortement déçu. Que veux-tu ? Ai-je perdu mon temps ? Peut-être. Peut-être pas. A toi de me le dire, toi qui as suivi cette histoire. Les quelques lignes résumant mon histoire. ♦